HUBERT MONTEILHET LES CAVALIERS DE BELLE ILE+DE PLUME ET D'EPEE
Paris, Edition de Fallois, 400+446 p.
Aventures d'Arnaud d'Espalunge, gentilhomme béarnais, au temps de Richelieu. Aventures picaresques d'un personnage ambigu: passe du protestantisme au catholicisme par intérêt, se laisse acheter par un riche jeune seigneur qu'il devrait affronter en duel (et qu'il finit par tuer malgré tout), devient espion de Richelieu. Mais a en même temps des délicatesses, des états d'âme, des gestes généreux.
Arnaud défend en sous-main Anne d'Autriche contre Richelieu, sauve une religieuse de la prostitution, etc... C'est une sorte de d'Artagnan en plus réaliste.
Le récit, très vif, est très bien écrit. Très leste, avec les moeurs dévergondées de l'époque, les complots pour que Louis XIII produise enfin un héritier...
L'articulation avec Dumas est subtile. Le patronage de l'écrivain est explicite au dos de la couverture: "(livre) d'une audace et d'une allégresse à faire pâlir Dumas".
La première page s'ouvre sur la mort de d'Artagnan. Lui et les trois mousquetaires sont aperçus de ci de là dans le livre, sans plus. Pus subtil, l'intrigue finale pour faire donner un enfant à Louis XIII est inspirée à Arnaud d'Espalunge par le récit fait par d'Artagnan de sa nuit avec Milady. Et l'image finale évoque une interprétation surprenante du Masque de Fer. Mais finalement, il y a peu d'allusions directes.
Au total, il s'agit d'un excellent roman, plein d'invention, avec des personnages hauts en couleurs, et une évocation crue et brutale de l'époque et de ses moeurs.
Dans le premier volume de ses Mémoires, un jeune cadet de Béarn, Arnaud d'Espalungue, nous racontait d'une plume gaillarde les aventures de sa vingtième année.
Vingt ans plus tard, au sortir de la Fronde, Arnaud, devenu baron d'Espalungue depuis la mort de son père et de son frère, mène à Paris une vie paisible. Mais de nouvelles aventures l'attendent, qui vont le conduire de Paris à Rome, puis en Bretagne et enfin en Angleterre, pour sauver l'honneur d'une reine qu'une imprudente confidence risque de compromettre à jamais.
Sous la plume alerte de Monteilhet ressuscitent un régime prodigieusement vénal et quelques-uns de ses acteurs : un Mazarin qui amasse et dissipe avec un tortueux génie, un Colbert besogneux et pourri d'ambition, un Fouquet léger et extravagant, une Anne d'Autriche mûrissante et bien embarrassée, un duc de Beaufort perpétuellement ahuri, une Madame de Chevreuse qui prend sa retraite à regret, un bonhomme Rossignol, éminent spécialiste du Chiffre, un Molière surprenant, une bande de sorcières et d'empoisonneuses à donner le frisson, des comparses hauts en couleur …
Un premier XVIIe siècle, de violences, d'intrigues et de panache, celui de Corneille, s'achève, avant que Louis XIV ne vienne imposer enfin — du moins en apparence — une manière d'ordre moral dont on se moquera sous la Régence.